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Trois étapes pour se préparer à l’évaluation des risques liés à la nature du TNFD

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Sustana Baringa TNFD Article

Par Kathryn Beros, spécialiste de l’environnement et du développement durable de Baringa, et Srishti Srivastava, spécialiste du développement durable de Sustana

Après presque deux ans d’efforts, le Groupe de travail sur les informations financières liées à la nature (Taskforce on Nature-related Financial Disclosures ou TNFD) a récemment dévoilé ses recommandations finales en matière de divulgation financière. Le cadre du TNFD vise à positionner l’environnement au cœur du bilan des entreprises en permettant à ces dernières de mesurer et de gérer les risques naturels qui influencent leurs activités, et de cibler des occasions de prévention et d’atténuation de ces mêmes risques.

Maintenant que les détails du cadre du TNFD sont connus, les organisations peuvent poser certains gestes – en plus de leurs initiatives de gestion des risques climatiques ou dans le cadre de celles-ci – pour prendre une longueur d’avance en matière d’évaluation et de divulgation des risques liés à la nature. C’est précisément ce que vise la plus récente collaboration de Baringa et de Sustana : en procédant à l’évaluation de ses occasions et de ses risques liés à la nature, Sustana sera en mesure d’élaborer un plan de résilience et de faciliter sa prise de décisions.

Dans cet article, nous présenterons les conclusions principales de l’évaluation LEAP de Sustana, réalisée en partenariat avec Baringa. En misant sur notre expérience, nous avons identifié trois étapes clés que toutes les organisations peuvent suivre pour faciliter l’évaluation de leurs occasions et de leurs risques liés à la nature :

  1. Définir la portée de l’évaluation
  2. Tenir compte de vos capacités
  3. Choisir vos outils de mesure

Avant de plonger dans le vif du sujet, prenons un pas de recul pour répondre à certaines questions importantes sur le TNFD et ce qui le distingue des autres cadres d’évaluation climatique existants.

Qu’est-ce que le TNFD, et pourquoi les entreprises devraient-elles y porter attention?

Le TNFD est une initiative mondiale qui vise l’élaboration et le déploiement d’un cadre de gestion et de divulgation des occasions et des risques liés à la nature. Ce cadre offre aux organisations un outil commun pour mesurer l’incidence des changements apportés à leurs actifs environnementaux et à leurs services écosystémiques sur leurs activités, leurs actifs, leurs fournisseurs et leurs clients. Il invite également les entreprises à cibler les opportunités générées par la protection et la promotion de la nature. Ultimement, le TNFD aspire à créer un changement de paradigme écoresponsable au sein des flux financiers mondiaux.

Bien qu’à l’heure actuelle, le TNFD n’exige pas la divulgation des données financières, nous n’avons pas de doute quant à ce que l’avenir nous réserve à ce chapitre. Ce n’est qu’une question de temps avant que la divulgation des risques liés à la nature soit intégrée aux exigences réglementaires, comme c’est déjà le cas pour la divulgation des risques climatiques. De plus, puisque les normes climatiques ont préparé le terrain, la divulgation des risques liés à la nature pourrait être traduite sous forme de réglementation encore plus vite qu’attendu. On n’a qu’à penser à l’International Sustainability Standards Board (ISSB), qui a confirmé l’intégration du cadre du TNFD à ses normes de divulgation en matière de développement durable, dont l’entrée en vigueur est prévue le 1er janvier 2024.

Plus une entreprise attend pour développer ses capacités de gestion et de divulgation des risques liés à la nature, plus elle est vulnérable aux risques réglementaires et plus il sera difficile et coûteux de rattraper le retard. À l’opposé, les organisations comme Sustana qui agissent dès aujourd’hui se positionnent en vue de gains importants. En étant proactives, elles seront en mesure de brosser un portrait plus clair des risques posés par la dégradation des milieux naturels sur leur entreprise et ses bénéfices, et pourront saisir les nombreuses opportunités créées par un modèle d’affaires respectueux de l’environnement. Les entreprises qui s’intéressent dès aujourd’hui aux risques liés à la nature peuvent quantifier et gérer ces derniers avec davantage de précision, identifier les lacunes de leur cadre environnemental, social et de gouvernance (ESG), prendre des décisions plus éclairées en matière d’allocation du capital, et ainsi bonifier leur valeur organisationnelle.

En quoi le TNFD diffère-t-il du cadre climatique du TCFD?

Heureusement pour les organisations qui commencent tout juste à s’intéresser à la gestion et à la divulgation des risques liés à la nature, le TNFD a été conçu pour optimiser son interopérabilité avec un cadre existant au nom similaire : le Groupe de travail sur les informations financières liées au climat (Taskforce on Climate-Related Financial Disclosure ou TCFD).

Le TNFD présente une structure et une approche largement inspirées du TCFD. Il définit les risques physiques, transitionnels et systémiques de la même façon que son prédécesseur climatique, conserve les mêmes piliers de divulgation – gouvernance, stratégie, gestion des risques, mesures et cibles –, et adopte une portée et un modèle d’analyse des scénarios similaires. Éventuellement, nous nous attendons à voir de plus en plus d’organisations produire des rapports TNFD et TCFD conjoints dans le cadre d’efforts élargis de gestion et de divulgation des risques liés au développement durable.

Or, il existe une distinction cruciale entre les deux cadres. Les risques liés à la nature sur lesquels se base le TNFD sont beaucoup plus difficiles à quantifier et à atténuer que les risques climatiques couverts par le TCFD. Contrairement aux émissions de gaz à effet de serre, qui peuvent être mesurés en tonnes d’équivalents de dioxyde de carbone, la nature n’offre pas d’unité de mesure unique. De même, alors qu’il existe une cible climatique claire – limiter le réchauffement planétaire à 1,5 °C au-dessus des niveaux préindustriels –, la nature et la biodiversité sont des concepts vastes et beaucoup plus flous. Par exemple, une des cibles principales du Cadre mondial de la biodiversité de Kunming à Montréal vise à protéger au moins 30 % de la surface terrestre d’ici 2030, ce qui ne représente pas une cible concrète attribuable aux entreprises et aux organisations.

L’analyse et la prise en charge des risques liés à la nature nécessiteront un changement de paradigme, la transformation des données et la création de nouveaux outils. Conscient de cette réalité, le TNFD a élaboré une approche unique à l’évaluation, appelée LEAP, mise à la disposition des organisations pour orienter la mesure et la divulgation des occasions et des risques liés à la nature.

En quoi consiste l’approche LEAP?

L’approche LEAP est le processus d’évaluation des occasions et des risques liés à la nature du TNFD. Elle compte quatre étapes principales : repérer les actifs et les services écosystémiques (locate), évaluer les dépendances et les impacts liés à la nature (evaluate), identifier les occasions et les risques liés à la nature (assess), et se préparer à y répondre et à les divulguer (prepare).

Le modèle LEAP permet aux entreprises d’adopter une approche préventive en calculant leur dépendance réelle à l’environnement et leur incidence actuelle sur celui-ci. Si vous souhaitez entreprendre l’évaluation des capacités de votre entreprise conformément au cadre du TNFD, nous avons identifié trois étapes clés pour orienter vos efforts, tirées de notre expérience récente de l’évaluation LEAP de Sustana.

Étape 1 : Définissez la portée de l’évaluation

L’approche LEAP encourage les utilisateurs à réfléchir sérieusement à la portée souhaitée de l’évaluation, et pour une très bonne raison. En matière de divulgation des risques liés à la nature, la portée revêt une importance capitale. En effet, la majorité des organisations constateront que leurs activités sont influencées par un nombre incalculable d’actifs environnementaux, de services écosystémiques et d’interactions, dans un éventail d’emplacements et de canaux d’interaction.

« Définir la portée de l’évaluation constitue la phase zéro de l’approche LEAP. Cet exercice est absolument critique à la bonne marche des phases subséquentes puisque les risques naturels couvrent une gamme de facteurs incroyablement vaste et complexe. Si vous ne définissez pas clairement la portée de votre initiative, vous pourriez omettre certaines données nécessaires, ce qui rendra rapidement la mesure et la divulgation des risques impossibles à gérer. »

– Kathryn Beros, spécialiste de l’environnement et du développement durable, Baringa

Il est donc essentiel de considérer soigneusement et de définir avec précision les limites de votre collecte de données et de vos intentions de divulgation. Circonscrire votre évaluation dès le début vous permettra également de cibler les éléments qui mériteraient une évaluation plus approfondie. De manière générale, trois approches de portée croissante s’offrent à vous.

  1. Approche pilote : analyse des propres activités de votre entreprise ou d’un maillon unique de votre chaîne de valeur
  2. Approche progressive : analyse d’actifs sélectionnés parmi vos propres activités et la chaîne de valeur de votre organisation
  3. Divulgation complète : analyse de vos propres activités et de la chaîne de valeur élargie

L’objectif ultime est d’obtenir une vue d’ensemble de tous les actifs, tant au sein de votre organisation qu’à l’extérieur de celle-ci. Mais attention! Commencer par une approche trop exhaustive risque de vous décourager. De même, n’oubliez pas qu’il s’agit d’un nouveau processus, et que les exigences et les pratiques exemplaires continueront d’évoluer rapidement.

Néanmoins, ne laissez pas ce qui précède vous décourager. La pression entourant l’évaluation et la divulgation ne fera que s’intensifier dans les années à venir, et les entreprises devraient donc s’y préparer le plus rapidement possible. Commencez à petite échelle et intensifiez vos efforts au fil du temps. Par exemple, pour sa toute première évaluation LEAP, Sustana a adopté l’approche pilote, qui visait à mesurer les occasions et les risques liés à la nature uniquement pour ses propres activités.

Lorsqu’il s’agit de créer une base de données, assurez-vous de centraliser les données pour créer un point de référence fiable et cohérent pour vos divulgations futures. Clarifiez la propriété des données et veillez à les consolider autant que possible pour réduire la redondance et l’inexactitude. Finalement, assurez-vous que les membres de l’équipe concernés peuvent accéder aisément aux données, et évitez que certaines informations clés soient détenues par un seul propriétaire, qu’il s’agisse d’un individu ou d’une équipe.

Étape 2 : Tenez compte de vos capacités

Lorsque vous aurez défini la portée de votre évaluation, vous devrez réfléchir aux capacités requises pour définir et analyser les risques liés à la nature conformément au cadre du TNFD. Ces capacités s’expriment sur deux plans : vos activités internes et la chaîne de valeur externe.

Activités internes

Le lieu où se déroulent vos activités est un facteur fondamental pour comprendre votre dépendance à la nature et votre incidence sur celle-ci. Vous devrez donc dresser le portrait géospatial de vos activités principales et des limites physiques de vos actifs. Vos employés auront un rôle important à jouer dans l’élaboration de cette vue d’ensemble; assurez-vous de sonder plusieurs collègues issus d’un éventail d’équipes pertinentes.

Par exemple, Sustana a mené de nombreuses conversations avec ses équipes des opérations, des installations, de l’approvisionnement et de l’environnement, des secteurs où les postes tendent à avoir un lien plus direct avec les risques naturels, et où les employés sont généralement plus conscients de l’impact de leurs tâches sur l’environnement.

À ce chapitre, la prise de conscience est une capacité essentielle à développer. Si vos employés ne sont pas conscients de l’impact environnemental de leurs activités, vous ne pourrez pas comprendre ni mesurer avec justesse l’impact global de votre organisation sur la nature. Encouragez les membres de votre équipe à réfléchir à l’incidence de leur poste et des opérations qui en découlent sur la nature, et à mesurer leur dépendance à celle-ci.

« Les gens comprennent en quoi leur poste est essentiel à la bonne marche de l’entreprise. Or, ils ne réalisent pas nécessairement l’influence de leur travail sur l’environnement. C’est pourquoi il est si important d’ouvrir le dialogue à ce sujet. Les membres de votre équipe pourront alors faire évoluer la réflexion de “Quel est mon impact sur l’organisation?” à “Quel est l’impact de mon travail au sein de l’organisation sur la nature?” »

– Srishti Srivastava, spécialiste du développement durable, Sustana

Pour faciliter cette prise de conscience, vous devrez aller au-delà de la collecte de données unidirectionnelle. Voyez-la plutôt comme une occasion d’ouvrir le dialogue avec vos équipes, de leur permettre d’en apprendre davantage sur le concept de risques liés à la nature, et d’inclure ceux-ci dans leurs activités quotidiennes. Espacez ces conversations dans le temps et assurez-vous qu’elles soient spécifiques au contexte fonctionnel de chaque équipe. Ainsi, l’information pourra être digérée, appliquée et illustrée par des exemples tangibles, et contribuera à bonifier l’engagement et l’investissement des membres de l’équipe à l’échelle de l’entreprise.

Activités externes (chaîne de valeur)

Selon la portée de votre évaluation LEAP, vous pourriez également devoir recueillir des données sur la chaîne de valeur de votre organisation, tant en amont (approvisionnement) qu’en aval (consommation).

La collecte de données devrait être un processus itératif qui prend en compte les commentaires et la perspective de vos fournisseurs. Nous vous recommandons fortement de stocker les données recueillies dans un emplacement central qui assure le respect de la confidentialité et de la sécurité des renseignements des fournisseurs participants.

À l’heure actuelle, plusieurs entreprises risquent d’avoir de la difficulté à recueillir les données requises au sein de leur chaîne de valeur. Même si elles choisissent d’analyser un sous-ensemble de la chaîne de valeur, elles seront probablement confrontées à des enjeux liés à la disponibilité et à l’accessibilité des données, de même qu’à des limites d’analyse. Dans tous les cas, l’absence de données exhaustives ne devrait pas freiner les organisations. L’analyse de la chaîne de valeur s’améliorera au fil du temps, tandis que davantage d’institutions accélèrent leurs efforts de divulgation et que de nouveaux outils et de nouvelles normes voient le jour pour améliorer l’intégrité, la transparence et la disponibilité des données.

Étape 3 : Choisissez vos outils de mesure

La troisième étape consiste à sélectionner les outils qui vous aideront à identifier, à évaluer et à mesurer les occasions et les risques liés à la nature.

Le catalogue des outils du TNFD répertorie plus de 100 outils de collecte de données qui peuvent soutenir les organisations à chaque étape de leur évaluation LEAP. De nouveaux outils, permettant une spécialisation accrue et ciblant différentes capacités, font constamment leur entrée sur le marché. La pertinence de chaque outil dépendra de votre approche à l’analyse LEAP, et de vos capacités internes et externes. Pour déterminer les outils les plus pertinents et les plus utiles à votre organisation, considérez les facteurs suivants :

Portée ou précision?

Certains outils de mesure ratissent très large et couvrent une section plus étendue des exigences de divulgation, mais offrent cependant une précision moindre. De même, certains outils sont propres à une région donnée et offrent une analyse plus approfondie. C’est pourquoi définir les limites de votre analyse est crucial : cette délimitation vous permettra de choisir les bons outils à la lumière de la portée et de l’objectif de l’analyse.

Ressources à votre disposition

Tous les outils de mesure ne sont pas offerts gratuitement. Le coût de certains outils peut même atteindre des dizaines de milliers de dollars. Il est donc nécessaire de déterminer les outils les mieux adaptés à votre situation et de voir si vous avez le budget nécessaire pour vous les procurer. Comme l’étape finale de l’approche LEAP consiste à vous préparer à divulguer vos risques liés à la nature, les outils que vous choisissez devraient également vous permettre de mesurer les éléments préétablis (qui pourraient être uniquement des données internes pour commencer).

De même, vous devrez vous demander si vous disposez des ressources internes nécessaires pour déployer les outils choisis de façon efficace. Par exemple, certains outils de collecte de données comprennent de longues séries de questions. Vous devrez donc réfléchir aux procédés à mettre en place et aux personnes responsables de distribuer les questionnaires, de rassembler et d’analyser les réponses, et de mener des entrevues de suivi, au besoin.

Gardez également en tête que la gestion des risques liés à la nature n’en est qu’à ses débuts et sera appelée à évoluer rapidement. Le travail fait aujourd’hui devra être réactualisé au fil de l’offre de nouvelles solutions, de l’amélioration de la résolution des données, et de la mise en marché d’outils pouvant soutenir une approche LEAP plus prospective. Vous devrez donc continuer de vous renseigner pour demeurer au fait des nouveaux outils et approches, afin d’assurer que votre organisation est fin prête à saisir les occasions et à atténuer les risques liés à la nature.

Notre collaboration continue avec Baringa illustre toute la valeur d’une préparation adéquate. En agissant de manière précoce pour suivre les recommandations du TNFD, Sustana se positionne judicieusement afin de saisir les occasions et gérer les risques liés à la nature, et de tirer le maximum de sa transition écoresponsable.

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